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Je me souviens de ces heures perdues à espérer et que je continue de gâcher.
Tout est recommencement et chaque chapitre n’est que la répétition du premier.
Répétition de quoi ?
Mishima dit que tout est répétition de l’instant de sa mort.

Il dit aussi que l’homme se fait beau pour mourir beau.
Si la femme se fait belle, c’est pour plaire et vivre de sa beauté,
dans sa beauté, le temps qu’elle durera.
La beauté de l’homme n’a pour but que l’instant de sa mort.
Celle de la femme cherche à durer.

Cet instant parfait doit être une communion, la réunion parfaite de la pensée et de l’action,
Mishima employant l’harmonie de plume et de l’épée comme métaphore,
qui ne se réalise que très rarement dans la vie d’un homme et pas chez tous, souvent à l’ultime moment.

Les samouraïs usaient de ce principe.
Toute une vie au service d’un seigneur, ils prenaient leur destin en main pour l’ultime,
quand ils ne mourraient pas au combat : le seppuku, connu chez nous comme hara-kiri,
avant lequel, ils composaient un hai ku, leur poème d’adieu à la vie, face au soleil levant.
Ils joignaient ainsi avec harmonie, l’art de la plume et du sabre, la pensée à l’action, dans un seul geste purifié par le soleil.
Ce n’est pas du tout la même chose que de s’ouvrir les veines, ce qui n’est pas douloureux.
Le ventre est si riche en émotions chez la femme, en énergie aussi.
C’est le point d’énergie vital d’où partent sans y revenir les derniers sons que l’homme tire de sa lame de katana.
Comme un instrument de musique chirurgical,
il la fait pénétrer dans le flanc gauche et, le guidant dans la peau
et les chairs qui se découpent sur son fil, il la fait ressortir par le flanc droit.
L’homme connaît alors le prix de sa mort, en mesure chaque instant
à sa juste valeur, à la douleur qu’il en tire.
Pour ne pas se déshonorer en grimaces et en cris indignes d’un samouraï,
un camarade, un ami, ou même un ennemi a le privilège d’aider le samouraï d’entrer dans son paradis,
en détachant la tête du corps, d’un coup de katana.
Honneur qu’on laissait aux bourreaux en Europe,
pour des hommes sans honneur, avec un instrument moins civilisé et moins efficace :
la hache.

JPABT