B.A.M

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mercredi, 2 novembre 2011

LUNE SANS MOT DIRE

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Eclatante fut cette journée. Le soleil brillait bizarre et c'était pleine lune, alors...
Il a bien fallu que je continue à écrire, que je continue à vivre, au moins jusqu'au prochain soleil.
Parce qu'aussi curieux que ça puisse paraître, j'aimais le soleil,
comme on aime ce qui vous fait mal, avec crainte et un plaisir subtil.
C'était comme jouer avec cette amie de tous les instants.
Celle qui attend; qui attend et qui a toujours celui qu'elle attend.
Il me fallait rire de l'éclat de toutes mes dents, à chaque plaisanterie
pour arriver à me faire accepter de ce groupe de gens avec qui je n'avais
aucun point commun, ni d'autre intérêt qu'un certain appétit.
Elles avaient beau n'avoir rien dans la tête, ce n'était pas autre chose
que leur corps qui m'intéressait.
Et pourtant, elles avaient un goût tout autre quand se mêlait
plus que l'intelligence en elle-même.
C'est l'existence des sentiments qui me donnait ce que je recherchais
le plus avidement. Fallait-il laisser tomber là, ma propension naturelle à aimer
pour simplement ne penser qu'à baiser. Ne pas vivre ce qui piège tout le monde,
et ainsi me rassasier plutôt que de crever après une solitude physique
et mentale qui est la réalité de mon amour.
Quand elles avaient ce goût de mort, leurs vies seraient plus longues que celles des autres.
Je les savourais, atteignant la limite de non retour sans passer à gauche.
Cela pouvait être interminable. Mais jamais, je ne pouvais les faire pareilles à moi.
D'ailleurs, pour rien au monde je ne leur souhaitais cet enfer.
C'est pour cela, qu'un jour ou l'autre, quand je sentais proche la pente du déclin, je mettais fin à tout:
à elles, à moi sous cette forme.
Je redevenais un loup en chasse, je n'étais rien d'autre que sauvage.
Fini l'amour et sa prison dorée, son goût spécial.
Je replongeais dans la sueur et les frottements sans lendemains
puisque celles à qui je me frottais ne les voyaient pas , ces lendemains.
Souvent belles, parfois pas du tout, elles avaient en commun, l'odeur des femmes.
Cela sentait bizarre. C'était enivrant.
Qu'elles soient jeunes ou vieilles, pas une n'en réchappait.
Je n'avais pas de pitié, ce serait ma perte et puis ça serait la leur d'une certaine façon.
Elles mourraient heureuses. Jamais je ne m'offrais si elles n'étaient pas amoureuses.
Cela, je le sentais, comme je sentais la peur.
Mes oreilles se dressaient, je découvrais légèrement les dents, mais discrètement.
C'était un réflexe.
Pourquoi mes yeux bleus étaient-ils noirs? Pourquoi la lune me fait tant de mal
au coeur et parfois tant de bien. Si mal que ça me fait hurler à la mort.
Peu importe mon aspect, mon camouflage. Aucune, même celles qui s'en sont sorties,
ne pouvait se targuer d'avoir découvert quelque chose de probant me révélant,
tel que j'étais à leurs yeux. Mais aucune encore n'a mérité de s'en sortir,
malgré le semblant de bonheur ou de plaisir que j'ai pu leur laisser voir.
Aucune n'était une "pauvre fille" comme on dit.
En fait, je me faisais volontiers les dents sur ce genre de filles
qui mènent les mecs par le bout du nez et les assassinent de sang froid
en les cocufiant ouvertement.
Petite vengeance de ce que j'avais d'humain en moi, qui était masculin pour ne
rien gâter. Mais les femmes, elles, sur le nombre, étaient rares.
De véritables femelles, avec un caractère en béton, qui aimaient passionnément,
il m'est arrivé de regretter d'avoir mis fin à leurs jours, car certaines valaient
une vie d'homme, entière. Mais je ne voulais pas les voir vieillir.
Alors, après plus de dix ans d'union, parfois trente à dissimuler l'évidence,
il me fallait aider la nature. Elles auraient souffert de cette éternité,
ce cadeau empoisonné, s'apparentant au supplice de Tantale
sans l'acuité qui lui est donnée dans la légende, mais qui au bout du compte
menait ce que je suis à détester de ne pouvoir ni vieillir, ni mourir.
J'avais un but à accomplir que je ne savais pas. Si j'avais été muni de ces qualités,
que je finissais par prendre pour des tares; il s'agissait là,
je m'en rendais de plus en plus à la raison, de plus en plus fort,
plus haut ou plus bas selon où l'on situe l'enfer ou le ciel.
Mais l'enfer, c'était les autres, pour moi et partout, haut ou bas,
dedans ou dehors, avec ou sans toit.
Je ne sais pas quel est ce bien qui me ronge intérieurement.
Je n'en ai que rarement conscience et ne cherche jamais à
savoir pas plus qu'à changer l'ordre des choses. Réfléchis!
Ce n'est pas le bien qui te ronge, mais ton ver et ce ver est solitaire.
Pas toi. Alors pour y mettre fin, donne à ton ver des compagnons de décomposition.
Encore serait-il capable de se comporter comme toi et ferait-il le vide autour de lui en ton
sein? Chien fidèle, gardien de tes restes.
Mais même en cendres, tu ferais toujours ton oeuvre de malheur et jamais,
à jamais tu ne cesserais de t'en renaître, pour perpétuer cette tâche infiniment longue
qui fait de la mort, une illusion, une souffrance bien douce au regard de la vie.
Heureux, ceux que la mort cueille en leur temps.
Et j'essayais pour ma part de donner ce bonheur à quelques unes.
Sans pouvoir mettre fin à mes propres conflits internes,
à ces souffrances surmontées par la force des choses et qui,
il y a bien trop longtemps m'auraient fait connaître le goût de l'oubli.
Mais pour moi comme pour d'autres, il était trop tard.

JPABT

MAUDITES MACHINES

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Dans le soir d'un été neigeux, je battais le pavé brûlant d'une rue déserte.
Il faisait chaud, faisait froid et je n'avais pas encore contracté ce virus qui courait partout.
Les signes en étaient partout présents:
Des accélérations du rythme cardiaque, des frissons,
des bouffées de chaleur, comme des noeuds dans le ventre.
J'adorais et je détestais cette maladie. Pourtant, je l'évitais comme la peste.
Tous ceux qui se tenaient la main, se regardaient dans les yeux ou même s'embrassaient,
dans l'espoir inconscient d'une guérison, avaient en perspective beaucoup de fil à retordre.
J'avais connu ça autrefois, et ça faisait trop longtemps pour que mon corps s'en souvienne.
Mais ma tête et mon coeur en portent pour toujours la marque.
Mon ventre aussi, il me semble.
J'étais de ces oiseaux qu'on ne voit jamais parce qu'ils ne sont pas là.
Je volais entre deux eaux pour ne pas être vu, pour ne pas être pris aux pièges des humains.
C'est tout juste si ma lumière accrochait la pellicule argentée et c'était bien là ce que je cherchais.
Je volais à des kilomètres dessous ou dessus mais jamais de concert avec les bêtes humaines.
J'exécrais leur façon de trouver du réconfort, de se faire pardonner, leurs bassesses, de vouloir vivre
une autre vie supplémentaire, ayant déjà gâché celle-ci, dans un paradis qui n'existe pas plus que l'enfer.
Je trouvais ignominieux de faire passer ses espoirs, son amour, au nom d'une essence sans corps,
d'une essence sans essence, sans pétrole.
Je ne voulais pas, comme eux, remettre mon âme aux mains de ce rien qui peut déplacer des montagnes.
Je ne croyais en rien, ça me sauvait de tout mais surtout des autres et de ce fardeau qu'on nomme un dieu
qui évite aux hommes de porter seuls le poids de leurs pêchers et de se poser les vrais, les bonnes questions.
Et moi, je pouvais pêcher dix fois, cent fois comme eux, je ne me sentais que plus léger. Je ne croyais pas en ça.
Et c'est bien simple, le fait qu'on veuille me faire y croire, au départ et tout le long
du parcours de ma vie, c'est aussi coupable que le communisme et c'est bien pire.
Je ne savais pas pourquoi je vivais. Je savais comment, que ça avait été
difficile au début et ça n'avait rien à voir avec un embryon de déité.
Je ne pouvais pas en être absolument sûr mais tous les autres aussi, étaient des moi,
et moi, j'étais un autre que moi. Enfin, c'est ce qui apparaissait dans l'éclairage qui dérange
de quelqu'un qui vous juge, non sur votre apparence mais sur votre vérité; ou plutôt, pas la vérité mais la réalité.
Une vérité, c'est tellement subjectif, elle dépend du nombre de personnes qui disent la détenir
et peut être aussi bien un mensonge qui s'ignore.
La réalité dépend du point de vue où l'on se place, elle est multi-focale.
A d'autres moments, quand je me suis senti merdeux, là, je sentais pleinement ma valeur.
Et je n'avais pas de quoi pavoiser.

Un exemple : tout à l'heure, je me suis senti pire que merdeux.
Quelqu'un venait de renverser, avec sa voiture, une chatte pleine jusqu'aux yeux.
J'ai pas vu l'accident proprement dit, mais la boule de poils au milieu de la route, qui respirait encore.
Comme presque morte. Mon coeur a bondi vers cette boule de poils pour l'aider mais je n'ai pas bougé.
Personne n'a bougé. Elle était là, au milieu de la route, exposée. Puis, elle s'est mise sur ses pattes.
Apparemment elle avait la patte arrière gauche cassée. Puis elle m'a regardé,
les yeux perdus je ne sais où, en état de choc. Sa bouche pleine de sang.
Mais je n'ai rien fait et les voitures l'évitaient. Il aurait peut-être mieux valu la buter, une fois pour toute.
Tous les signes d' hémorragie interne. Elle n'en n'avait pas pour longtemps.
Elle s'est mise à marcher pour aller se cacher derrière l'arrêt de bus d'en face.
Elle attendait la mort comme nous, le car naval.
Je suis monté et dans le bus qui s'éloignait, je l'ai vue qui me fixait toujours, crachant le sang par sa bouche.
J'ai eu mal au coeur de n'être pas intervenu, et qu'elle ne soit pas morte sur le coup.
J'ai souhaité qu'elle meure d'un coup, et peut-être pour le spectacle d'un corps démantibulé,
complètement éclaboussé de son sang, mordant la poussière, l'oeil encore vivant,
plein de reproches envers l'adversité et les humains, avec leurs
maudites machines.

JPABT

CONS, FESSONS!

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Cons, fessons! (Tout dire avant de mourir)

Aujourd'hui je prends la voiture et je roule dans la nuit, seul, les feux éteints dans les rues éclairées.
Veux-tu que je roule toute la vie comme ça, passant de villes en campagnes, de campagnes en victoires et de victoires en débâcles?
Toi qui attends un être exceptionnel, sans modestie fausse ou larvée, n'attends plus et sers moi de ta coco dans mon coeur, car je suis à la panne ce que l'essence est à ma peine.
J'ai besoin de rouler et dans quelques jours, plus qu'avant, il va falloir rouler plus vite, plus fort et bientôt sans essence.
C'est le djihad: la guerre sainte islamique et c'est pas fini. Les canons vont parler et les épées de Damoclès vont tomber; pas forcément où l'on croit.
Cela bouge ici, là-bas aussi, mais on ne veut pas le voir. Cette fois-ci est la bonne et j'ai peur. Je n'ai pas tant crainte de mourir, mais de ne plus pouvoir souffrir ou aimer.
C'est maintenant le temps qui me manque et c'est toujours comme ça que j'ai fonctionné jusqu'à présent.
Toujours réagir, seulement au dernier moment, quand il est trop tard, quand il n'est plus temps de réagir, d'agir. Et c'est la vitrification!
La vitrification : belle mort que voilà. Noyé dans la masse, mourir solidaire en peuple, en un seul génocide. Meurtre d'un peuple par un autre peuple.
C'est ce que tout le monde désire et ce n'est pas une solution. C'est même le contraire. C'est un problème plus grave qu'on pose à la place d'un autre problème.
En attendant dans l'intervalle, des millions d'âmes même musulmanes, des âmes humaines avant tout, vont disparaître, comme par magie.
Je déteste ça et pourtant je l'ai envisagé, je l'ai même souhaité. La haine fait faire tant de conneries qu'on ne fait pas par amour.
La haine fait croire aux hommes qu'ils sont sorciers, ingénieurs physiciens ou chimistes, ou simples hommes politiques.
Les pions de ce jeu qui n'a d'autre terrain que le berceau de l'humanité : le Tigre et l'Euphrate, c'est toi, c'est moi. C'est triste à en rire.
On va commencer la fin, là où a fini le commencement, jardin d'Eden à la con, devenu un marais, un désert.
C'est quand même trop bête mais peut-être que les livres avaient écrit l'histoire bien avant qu'elle ne se donne forme et ne s'auto-détruise, puisque , quand toute âme aura disparue, il n'y aura plus d'histoire.
Simplement peut-être ailleurs, relayées par quelques tonnes de métal voyageant dans l'éther intersidéral, des légendes sur une planète bleue comme une orange, qu'on appelait la Terre.
Alors on se demande pourquoi je hais le fanatisme, ou même le principe d'abrutissement des religions non tolérantes qui n'aspirent pas à l'élévation de l'âme
mais à sa mise en esclavage, à son embrigadement et à la conquête plus grande de nouvelles âmes sur de nouveaux territoires. C'est ça la guerre de religion.
Mais en rejetant tous ces mécanismes, je me pose en guerrier et en conscience, en une croyance qui est mienne jusqu'aux tréfonds de moi-même.
Et si je me bats au sein d'une armée, c'est parce que ses buts, mêmes obscurs ont pour visée d'empêcher une religion de s'étaler, de détruire, d'embrigader.
Car en elle-même, cette religion génère des despotes, puisque son interprétation est despotique. Qu'il s'agisse de la religion musulmane ou catholique.
Je les rejette alors toutes deux sur le même pied d'égalité. Le moyen le plus sur, pour elles, de se détruire, c'est de faire face au progrès.
Là, les faux principes éclatent devant le miroir de la science. La conscience s'éveille et si l'homme n'en devient pas meilleur, il en devient moins con, et c'est déjà pas si mal.
Mais cette guerre est tellement à double tranchant que si les hommes ne comprennent pas vite qu'ils sont le jouet d'une part et d'autre de croyances fausses et erronées,
ce sera la dernière fois que cela pourra leur arriver. Si l'homme est mauvais... peut-être.
Moi, je persiste à croire qu'il est bon, pour reprendre la pensée de Jean-Jacques Rousseau,« naturellement bon », même s'il porte en lui le ferment animal de sa propre perte,
la notion de territorialité dont tous les vices découlent, notamment celui de l'argent.
Ce que sa propre humanité qui est une tout autre richesse, lui permet de combattre par le partage, l'aide, l'accueil, le don, l'écoute et l'empathie.
Ce n'est pas en se réfugiant, dans une religion, comme une autruche se met la tête dans un trou que chacun trouvera un réconfort véritable, mais plutôt l'aliénation de son libre arbitre.
Mais de toute part, je me pose là pour "juger", même si je n'en ai ni l'envie, ni la légitimité, de la bêtise des hommes en masse.
Les moutons de Panurge n'ont qu'à bien se tenir; la concurrence est écrasante chez leurs homologues à deux pattes. Le plus bête dans l'histoire, c'est que tout le monde ira à l'abattoir.
Maintenant que tout est dit et qu'on n'y peut plus rien, je reste avec mes souvenirs, mes regrets aussi, quoique j'ai pu dire ou avoir l'audace de penser.
J'aurais aimé écrire. Non pas un livre, mais quelque chose de plus vrai; même si ça ne dure pas autant. Le livre, c'est vrai, j'aurais aimé l'écrire.
Mais pour cela, il faut avoir quelque chose à dire, à exprimer, quelque chose de profond et d'humain, il faut avoir l'amour en soi.
Non, moi j'aurais voulu écrire avec une autre plume sur le corps nu de la seule dame qui aurait pu, à mes yeux, porter ces écrits-là, même si elle ne le voulait pas.
Est-ce bien considéré de le redire encore, je ne le sais pas et je m'en moque un peu, je veux des enfants de toi. Si personne ne sait qui tu es, c'est qu'il n'aura pas lu ces cahiers.
Tu es La femme, tu es Vénus, ronde comme la Terre ensemencée. Ces écrits là te combleraient dans tes désirs de mère et dans les miens de père, dans les nôtres inconscients du don de la vie,
de la prolongation de la notre en espèce, de notre apport à leur vie, cette manière de pérennité qui est l'amour parental, si imparfait soit-il.
Je le veux maintenant, même si je ne te désire plus en corps, ni en esprit, mon amour est resté intact. Et ce n'est pas en souvenir du passé, ni pour laisser une trace.
Non, c'est pour donner la vie avant de donner la mort ou la combattre, même si donner la vie c'est donner la mort assurément, cadeau empoisonné et inéluctable que les parents font aux enfants.
Mais comment le leur dire? Que c'est par amour! C'est par amour que des millions d'années durant, la flamme de la vie s'est transmise et a embrasé ce beau fruit bleu que nous pourrissons.
Je sais que tu seras une bonne mère, imparfaite mais aimante, pour tes enfants tu te battrais à mort.
Et moi avant de partir, j'aimerais donner un sens à mon combat, donner vie aux êtres qui peupleront le monde pour lequel je vais donner ma peau, pour toi aussi.
Et si un jour, je reviens, je veux donner cette expérience acquise, pour leur profit, le meilleur de nous, que tout ce malheur ne se reproduise plus.
Tu vas te dire que c'est du délire et c'est peut-être vrai mais ce sont, à mon sens, les seules raisons qu'à un homme de se battre, de "réagir" parce que pour moi réaction veut dire combat;
la fin veut dire la mort et les choses ne sont pas si empruntes de rectitude dans ce monde, mais c'est comme cela que je les vois et que je veux me les faire à mon goût et pas au goût de la masse.
J'ai l'impression de me donner une importance que je n'ai pas, moi le quidam, j'ai la désagréable sensation de m'aimer peut-être trop, au seuil de la mort, moi qui ne m'aimais pas,
et si tu savais comme je me déteste pour ça, à souhaiter en mourir. Et le souhait disparaîtra pour laisser place à la réalité, une fois exaucé.

Toutes ces photos, cette collection érotique si peu pornographique au final, sont la trace de mon indécision, de mon mal-être et d'une angoisse permanente et obsessionnelle,
calmée au quotidien pour me permettre de vivre serein. Mais cette occupation peut être de chaque instant et prend un pas important sur ma vraie vie, m'empêchant finalement d'être heureux, mais vivant et rassuré.
Son pendant est cette boulimie, cet appétit impérieux d'amour, d'affection, de sexe, jamais rassasié. Alors, je recherche la beauté dans tous les sens du terme, même si je prône mon dégoût de la perfection
qu'au fond je recherche, au fur et à mesure que je tends à l'approcher, elle s'éloigne insaisissable.
Cela pourra paraître salace, de mauvais goût, mais c'était mon jardin secret et je tenais à ce qu'il le reste, jusqu'à ce que je me voue à un seul corps, une seule âme, le jour où je brûlerai tout.
Ces déviances "désirielles" ou "phantasmagoriques", je ne les considère pas avec honte mais je n'aimerais pas être réduit dans le souvenir que je laisserai après ma mort, à cette névrose compulsive qui m' a
considérablement réduit de mon vivant en tant que mâle nécessaire. Cette névrose m'a bridé mais j'ai fait ma vie en en prenant mon parti, comme quelque chose que je maîtrise alors que j'en suis le jouet.
En contre partie, je suis devenu d'abord froid et manipulateur, si peu acteur, tellement rêveur. Je ne sais pas à qui je dois dire ou non merci de ce cadeau pourri.
Alors je regarde autour de moi et je vois la misère de l'âme de certains, de cœur d'autres, j'ai pitié et j'en souffre parce que j'ai encore toute ma tête et cette conscience aiguë des autres en tant que personnes humaines, qu'autres moi, méritant le respect. Beaucoup se croyant dignes d'un respect qu'elles ne méritent pas, et d'autres le plus grand nombre, étant dignes de tout le respect qu'on ne leur a jamais montré, sans en avoir eu la conscience.
Et je suis heureux de savoir que cette vie a une fin, pour moi comme pour les autres, même si je la redoute avec une acuité plus grande depuis que je sais qu'un jour, je deviendrai père.

J'aime les femmes, mais je ne les ai jamais "comprises". C'est plutôt que je les considérais en êtres bizarres, d'exception et pourtant si prévisibles après coup, parfois si médiocres et souvent si merveilleuses,
gouvernées par leurs sentiments, leurs rêves, leur spiritualité et leur corps. J'aurais pu ne pas les croire humaines et pourtant, elles le sont tant.
Je ne sais pas ce que je suis moi-même et je me pose tant de questions qu'à force de chercher des réponses, je vieillis encore trop vite.
Inconsciemment, suivre la trace de son grand père, de ses deux grands pères, car je n’oublie pas que j’ai fait à l’un, pour de funestes raisons, ce qu’on reproche à d’autres et dont je suis contrit profondément,
d’avoir fait à celui qui me restait encore. Inconsciemment, suivre la trace de mon père dans sa perturbance, suivre un chemin tracé dans le sable, si c’est possible, par grand vent sur des sables émouvants,
d’en prendre plein les yeux et la bouche, plein les oreilles, à en rester sourd et tout entendre, comprendre, les pieds en sang, le cœur aux vents, bons ou mauvais et d’avancer pourtant.

Le marcheur n'a pas encore entamé sa longue route vers l'infini, qu'il entendra bientôt le carillon sonnant le dîner, là où il doit aller.
Non, ce n'est pas une croisade, en a pourtant l'ampleur, l'aire.
De ce nid d'aigle arabe, le marcheur de la célèbre blague demandant sa route:
" L'Arabie c'est où dites?
Par là, mec!"

JPABT

vendredi,28 octobre 2011

DES CONFITURES

Tout doré qu'il est, le miel coulait du pot renversé sur la « messa de madera » comme on dit si bien en espagnol; table de cuisine où s'adonnent les frivoles servantes à des jeux pas toujours culinaires.
Les placards de l'antre de la bonne chair, comme se plaisait à l'appeler le maître séant, regorgeaient des confitures et des pots de fruits au sirop de sucre, que confectionnaient les mégères quand elles ne se faisaient point trousser.
La vision de toute cette nourriture comblait déjà, les appétits les plus voraces et les bourses quelles qu'elles soient, se vidaient jusqu'à plus soif, aux vues de ces appâts enjôleurs.

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DEDICACES

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scotché dans la boue

Dans la lumière rouge d’un matin, allongé de tout son long, l’homme songeait à l’orage de la nuit d’avant.
Il était maintenant malade dans ce jardin d’Eden où la rosée s’évaporait en nuages exotiques.
Ici encore, il resterait la nuit durant, toute sa vie jusqu’à sa fin prochaine.
Le soleil levant luisait rouge sur cette forêt d’un vert abondant d’eau.
Des oiseaux d’argent brillaient dans le ciel qu’ils traversaient tels des flèches de feu.
Le jour commençait à chauffer l’atmosphère, mais pour le réchauffer lui, il était trop tard.
Le sang rouge ne coulait plus sur son habit vert.
Des insectes d’argent avaient croisé sa route, volontairement.
L’un était ressorti de lui, mais l’autre, Jérémy avait réussi à l’enfermer dans son ventre.
Il sentait bien que la bête voulait sortir. Ça lui faisait si mal.
Autour de lui, la jungle semblait un matelas de verdure, un peu de fraîcheur dans cette atmosphère pesante, presque étouffante.
Ses copains étaient là avec lui et lui tenaient compagnie mais il n’entendait plus leurs voix, il ne sentait plus leurs souffles.
Tiens ! Là-bas se tenait Harry qui dormait dans les bras de Jerry son coéquipier.
Il avait pas compris quand il s’était mis à pisser le sang ; mais Jerry, lui avait bien vu qu’ils étaient devant la sortie d’un nid de frelons métalliques Viêt-Cong.
Alors il était allé le tirer de là. Mais les frelons trop voraces, avaient aussi transpercé Jerry.
Leurs yeux ouverts ne fixaient plus rien. Ils regardaient devant eux, comme si ils voyaient quelque chose que Jérémy ne pouvait pas voir.
Alors, Jérémy, il voulait savoir. Pourquoi malgré tout, il ne pouvait pas dormir comme tout le monde.
Immobile qu’il était, Jérémy fit pivoter sa tête pour voir alentours.
Il remarqua en revenant à sa position initiale que les sangs qui coulaient sur la peau noire de Jerry et sur la peau blanche de Harry, se mêlaient dans une flaque où venaient boire les insectes de la forêt.
Il avait reconnu là-bas à droite, le bras de Bob à son tatouage, alors que Bob, il gisait à sa gauche, enfin, la moitié du bas,
tandis que le haut de Bob avait réussi à ramper d’un seul bras loin de la bouillie que la mine antipersonnel avait laissé du bas.
Sacré Bob, il fallait toujours qu'il se démarque des autres. On le surnommait "l'original".
Mais malgré tout, c'était un type formidable qui se serait coupé en quatre pour ses potes.
C'est d'ailleurs ce qu'il s'était passé.
Jérémy, il n'avait pas peur, mais le fait que tout le monde ferme sa gueule, ça le faisait chier.
Il sentait bien qu'il y avait un froid. Depuis leurs classes, ils étaient ensemble. Lui en voulaient-ils tous, de ne pas partir avec eux?
Puis il se résonna et conclut que non. Il rechercha une compagnie. Le temps qu'il lui restait, il ne voulait pas le passer tout seul.
Il rampa jusqu'à Richard car il savait trouver dans son paquetage, son transistor. Bingo! Les piles étaient neuves, Richard avait été prévoyant.
Depuis qu'il avait appris qu'il était papa, il faisait attention à tout, il avait même posté son premier mandat hier.
La douleur, ça lui déchirait le ventre, alors Jérémy revint à sa place.
Il ne voulait plus bouger maintenant, car cela réveillait la bête qu'il gardait en lui, et puis de toute façon, il fallait conserver l'harmonie de ce tableau de chasse Viêt-Cong.
Et Jérémy, c'était un artiste, il respectait ça chez les gens.
Il alluma la radio. Il voulait écouter les Rolling Stones.
Il se disait qu'il pourrait mourir heureux sur "Time is on my side", ou bien "Heart of stone".
Le gars qui causait dans le poste, c'était celui qui tous les matins criait "goooood morning Vietnam".
Il se sentait un peu chez lui maintenant. Le gars de la radio joua "Paint it black", une nouveauté.
Il aimait ça aussi. Son sourire se figea de façon éternelle et il rejoignit ses potes, sur un air des Stones.

JPABT

REQUIEM

LE MAL AISE

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Gros plan sur une goutte de sueur qui perle sur mon front.
Y’a comme un malaise.
C’est d’une sueur froide que se manifeste mon angoisse et pourtant je n’ai pas de quoi être angoissé.
Il y a quelques millièmes de seconde, le type en face vient d’appuyer sur la détente de son colt « cobra ».
Il y a mis le temps. Faut croire qu’elle était dure, la gâchette de son feu.
Gros plan sur mon œil noir avec dedans une fenêtre ouverte sur le vrai, la lumière qui s’y reflète.
Champ, contre-champ, mon œil noir et son étincelle, l’œil du pistolet, ce trou noir et sans âme, quoique sait-on jamais.
La détonation se propage dans l’espace comme le grondement d’un orage, ou celui d’un torrent en furie arrachant tout à son passage.
Les cris de soixante dix-huit tours passent en trente trois-tours.
Ça y est, la balle comme un lièvre sortant de son terrier, vient de surgir.
Elle regarde à gauche, puis à droite, comme on le lui a appris et dans un éclair se dirige vers moi en prenant son temps dans un flash blanc et bleu qui m’éblouit.
Sortant de la fumée, je vois son corps d’argent qui tourne sur lui-même dans une rotation latérale.
Ma tête est lourde de l’alcool et de ma vie, mais je ne veux pas fermer les yeux.
C’est trop beau. J’entends un sifflement qu’elle fait en fusant l’air. Pourtant, il n’y a pas de quoi siffler !
Elle se traine comme tout depuis que j’ai traité l’autre andouille d’eunuque.
Pourtant, il n’a pas bronché tout de suite.
Quelqu’un a dû lui glisser dans l’oreille comme une peau de banane, que ça voulait dire l’un des plus beaux métiers du monde,
l’un des plus grands supplices de Tantale qui puissent exister aussi, enfin bref que ça voulait dire « castré ».
Là, comme un taureau, non, comme un bœuf, il a vu rouge ou rose… c’est dingue ce que peu de cervelle peut vous amener à faire. Lui, il vient de commencer à m’assassiner.
Ça y est, la balle s’est quand même rapprochée. Là, enfin elle me taraude la peau. Et moi je la regarde faire.
Quelle conne, elle prend son temps. Elle n’a pas encore totalement pénétré mon corps.
C’est tellement lent que ça tient de la torture, cette mort qui n’est pas violente par sa rapidité mais par sa douleur.
D’ailleurs, aujourd’hui, la douleur ne sera pas absente. Mon corps, je le sens qui me tiraille, qui me brûle, je n’ai pas envie de ne pas avoir mal, une autre fois peut-être.
Pour une fois que je ressens quelque chose.
Ça me fait plutôt marrer de voir cette balle qui s’énerve sur ma peau, tel un gamète mâle sans flagelle sur un œuf humain, forcément féminin.
Ma chair brûle, j’en sens l’odeur, puis grésille à point. Très cuite, bleue ou saignante, la viande ?
Saignante, je crois, vu la tâche qui apparaît sur ma blanche liquette à jabot, dans la lumière du tunnel que la balle continue de creuser avec de plus en plus de peine,
où s’engouffre un torrent de sang qui continue de maculer cette chemise que j’arrache. Le sang gicle lentement en face de moi, puis coule sur ma peau.
Liquide ! Liquide puis visqueux au contact de l’air. La balle vient de ressortir sous l’omoplate gauche après avoir proprement transpercé mon cœur.
Puis, fatiguée de tant d’œuvre accomplie, va lentement toujours aussi brillante, se ficher dans le mur derrière pour gagner un repos bien mérité.
Même si je n’ai pu le voir, je le sais. Le bruit en est devenu caractéristique. Ça y est. C’est plus lent à venir que parfois, mais ça vient.
Le sang monte à ma bouche et déborde. Ah, le goût métallique de mon sang. Et je ris.
Mon cœur est vide de son sang. L’autre en face est devenu pâle. Va-t-il recommencer l’opération ?
J’avoue que ça me ferait vraiment plaisir. J’adore ça. Dommage que les gens aient tant d’appréhensions. Ah, merde ! J’ai mal. Je me meurs.
Ah, ah, ah ! Quelle connerie. C’est sûr que ça fait mal. Mais comme m’a dit mon docteur : y’a pas de mal à se faire du mal !
Le plus dur, chaque fois, c’est d’avoir mal.
Mais ce qui me frappe, c’est qu’à chaque fois les gens ne veulent pas m’achever. Ça me ferait tellement plaisir d’avoir à en finir pour de bon.
Mais jamais personne n’aurait l’idée de vérifier que je devrais être mort. Alors quoi !
Pas étonnant que j’aime jouer avec la dame qui tient tous les fils entre ses mains.
Mais mon fil à moi, lui échappe toujours. Depuis combien de temps déjà ?
J’en ai crevé des hommes, j’en ai violé des femmes. Mais il n’y a pas d’enfant de mes œuvres. Jamais je n’ai eu d’enfant.
Quant aux viols, c’est leur esprit que j’ai pénétré de force, laissant leurs corps abandonnés. Pourquoi tant de pouvoir sur les mortels ? Moi qui ne suis ni mortel, ni immortel.
L’autre en face boit un coup, un demi d’un coup. Il est plein comme une outre, ce gros bœuf.
Et je continue de l’insulter. Il ne s’aperçoit pas qu’il m’a touché en plein cœur.
Tout est trop lent. Les cris en soixante dix-huit tours, sont toujours en trente trois tours. C’est pas beau à entendre.
Noir, blanc, rouge, bleu, gris. Voilà tout ce que je vois. Pourquoi m’ont-ils fait comme cela ?
Comment étais-je avant ce soir-là où un inconnu m’a acheté ce que je ne croyais pas être le plus précieux à mes yeux, déjà pleins de morgue.
J’en ai aimé des femmes, j’en ai souffert. Elles en sont mortes. Elles sont en moi, elles sont à moi.
Pourquoi depuis la rencontre de ce docteur inconnu, n’ai-je plus jamais changé ?
Comment l’expliquer ? Si ce n’est cette vieille hantise théiste. J’en ai des cicatrices, des balafres, et pourtant, je reste jeune et beau et con comme avant.
Elles, je les ai toujours aimées, toutes différentes et pourtant si semblables dans l’amour que je leur tiens,
dans la peine qu’elles me causent, m’ont causé, me causeront ou jamais car je les aurais peinées avant et dévorées ensuite.
Et puis les autres que j’aurais seulement brûlées de mon feu et dont les corps sans sommeil, chercheront à jamais à rassasier un appétit insatiable.
Pourquoi mes caresses les brûlent-elles de façon insoutenable. Pourquoi mes canines et mes griffes leur laissent-elles des marques indélébiles ?
Pourquoi ai-je toujours cette douleur constante au cœur, lancinante sans être insoutenable mais plus insoutenable car non physique,
et que j’essaie de purger par quelques trous pratiqués au palpitant par des douleurs plus fortes mais qui resteront peu de temps, car physiques.
J’ai mal au cœur, d’une fille, un jour, une seule fille, un seul soir, une seule nuit, et qui me hante pour l’éternité, qui s’était donnée puis reprise sans jamais s’abandonner.
Pire qu’une balle d’argent, elle m’a laissé ; plaie béante et souffrante à jamais.
Et cette fille, j’ai cru que c’était pour toujours. C’était pour une nuit, ma vie.
Ma vie n’est qu’une nuit sans fin.
C’était pour cette fille, qui fut tout pour moi, moi qui ne fut rien pour elle, qu’un soir j’ai vendu ce que je lui aurai donné sans partage, si elle ne m’avait laissé tomber pour l’ennui : mon âme !

JPABT

LA MOUCHE

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La mouche.

Un homme s’avance dans le matin blanc de brume.
L’herbe est verte, bien trop pour être honnête, il est trop criant.

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MEDUSE

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Echouée sur la plage au soleil couchant j'ai recueilli

une méduse aux fils argentés. Elle n'était pas belle. On aurait dit un tas de

glaires translucides. Je me suis brûlé les mains en la portant. Alors j'ai pris

des gants pour la plonger dans un aquarium d'eau de mer. Ella a bouffé tous les

poissons qui s'y trouvaient pour faire beau. Alors elle m'a dit merci. Elle

s'est épanouie et s'est mise à luire dans l'aquarium. J'ai éteint la lumière et

ça se reflétait sur les murs bleus. J'ai allumé le laser et le cd a porté ses

notes jusqu'à la paroi de verre de son refuge. Les vibrations, elle les a

ressenties agréablement et les lumières se sont faites plus douces, plus

changeantes aussi. Je lui ai parlé et elle réagissait de lumières en lumières

dans des teintes sentimentales, comme un appel. J'ai changé de cd et j'ai

balancé la gomme d'une musique synthétique aux airs marins. Ses lueurs sont

devenues provocantes, engageantes et je me suis mis à me poser des questions

sur leur nature. Etait-ce pour me remercier ou par simple curiosité animale?

N'y tenant plus, j'ai laissé tomber mon peignoir encore humide et je me suis

plongé avec elle dans l'aquarium. Chacun dans son coin, on s'observait. Je

n'osais rien faire pour ne pas l'intimider. Ses fils semblaient hésiter sur le

fil de ma peau entre la caresse et quelque chose d'autre. Puis elle m'a caressé

de ses fils. Les lumières se sont intensifiés. Cela ne brûlait pas, c'était

même agréable. Et la musique continuait. Elle m'a totalement enlacé, s'est

collée à moi. J'ai joui de cette chose puis d'un coup elle s'est contractée de

nouveau sur mon corps. J'étais médusé. Cet animal a pris alors une forme qui ne

m'était pas indifférente. Cela ressemblait physiquement à une femme grande et

translucide mais qui se remplissait de couleurs, qui se teintait petit à petit

pour devenir une sorte de sirène aux cheveux argentés.




Tandis que

ses fils passaient sur ma peau et caressaient ma tête. On aurait dit que cette

création simplement diabolique était le fruit de mes phantasmes les plus

fous. Apparemment, "elle"

avait lu au fond de moi ce que je ne soupçonnais encore pas, ce que je n'osais

imaginer. Comment alors, résister à la matérialisation de mes rêves les plus

secrets, les plus dingues. Cette "femme" toute neuve déjà mieux qu'ébauchée

éprouva le besoin de respirer l'air et c'est alors que je me rendis compte que

cela faisait bien un quart d'heure que je respirais sous l'eau. Nous sortîmes

en même temps de l'aquarium et je remarquai qu'un long fil restait relié à ce

dernier et plongeait dans l'eau. L a fille aux cheveux argentés avait des yeux

gris clairs et le blanc était nacré mais elle était physiquement parfaite de

corps même si elle ne parlait pas. Mes mains la caressaient sans trouver de

différence sinon en bonne qualité, entre

une peau normale et la sienne. Par contre elle semblait hyper sensibilisée à

mon contact où que je la touche. C'est comme si la liaison était plus que

charnelle, carrément électrique. Puis, nous fîmes l'amour. L'entente était tant

parfaite que ce fut tout, ce dont je désirais : le type de "scène"

qui m'apparaissait comme l'acte amoureux en soi, c'est à dire la communion

totale entre deux êtres que ce soit

physiquement comme mentalement. Chaque geste trouvait un écho ou une pose

propice, chaque pensée non exprimée une réponse immédiate. Je me souviens avoir

fait des trucs insensés en réponse à ses propres pensées, qui rendaient l'eau

de l'aquarium d'une lumière et d'une couleur, inconnues. Le parfum qui émanait

d'elle était d'une composition étonnamment bizarre. Une odeur d'algue, de sel,

sur la peau ajoutée à un parfum d'orchidée capiteuse. Il était à la fois frais,

salé et envoûtant, doux, sucré et épicé délicatement. Cette odeur puisque

c'était un parfum naturel, me rendait fou. Jamais, je n'avais ressenti une

telle excitation ni une si grande satisfaction olfactive et sensitive générale

qu'avant cette odeur. Mes forces et ma résistance s'en trouvaient décuplées.

Par contre, je ne savais pas d'où la

méduse tirait toute sa force pour être capable de tels prodiges, ni comment

elle pouvait penser car cet être n'était pas vraiment animal, pas plus

qu'humain. Et sur le coup, je ne songeais qu'à lui faire subir les meilleurs de

tous les outrages qui me passaient par la tête, et ces questions restèrent longtemps

sans réponses. C'était dangereux. Du matin, lorsque je la quittais, au soir

quand je rentrais, je ne pensais qu'à elle et mes absences s'en ressentaient

sur mon travail. J'étais comme une marionnette dont on aurait coupé les fils.

Je pris mon maximum de congés et je ne mangeais presque plus, sauf le minimum

nécessaire pour assurer physiquement. Les fils argentés, tels des guirlandes de

noël, envahissaient la maison. Elle devenait de plus en plus belle visiblement.

Le grain de sa peau était si parfait qu'un tatoueur japonais en serait devenu

gaga, rien qu'au toucher. Je ne recevais plus personne. Les quelques uns qui

entrèrent chez moi, constatèrent la présence d'une chose bizarre dans mon

aquarium, rien de plus. Cette chose qui se dépêchait une fois l'intrus reparti,

de s'épanouir pour venir m'aimer. Cette fille était vraiment trop sensuelle

pour qu'on puisse lui résister. Quelque chose au fond de moi m'avertissait d'un

danger. Je savais que ça ne durerait pas et ceci me faisait souffrir. L'idée de

la perdre m'était si odieuse et tout pourtant semblait aller à l'encontre de

mes craintes. Ce doute sournois m'avait pourtant bel et bien miné, ce qui me

donnait dans nos rapports une telle violence, comme si ça devait être la

dernière fois. Mais à chaque fois nous recommencions et ma douleur intérieure

n'en était pas moins forte. Je n'avais rien à apprendre d'elle puisque c'était

le fruit de ma pensée. Par contre, sous ce masque, elle pouvait tout découvrir

de moi. Ceci me faisait peur car j'étais vulnérable ô combien. Mes expériences

précédentes m'en seront le témoin. Petit à petit, je prenais conscience de ce

qu'elle pouvait être mais je ne cernais pas ses motivations, ni ses buts. Au début, c'était merveilleux. Si merveilleux

que rien de ce que j'avais vécu auparavant ne pouvait y être comparé. Une chose

me retenait de me laisser totalement maîtriser par cette entité si humaine et

envoûtante fut-elle et je m'apercevais trop bien que je perdais cette chose,

plus encore le réflexe de me défendre contre ce phénomène. Elle était une

drogue et ses effets sur moi étaient annihilateurs de volonté et je perdais ma

liberté sans vouloir la préserver. Et ça, je le savais être ma perte. Alors un

soir, j'eus une impression étrange sur la « highway », et je fis demi-tour

pour retourner sur la ville. Je pris une chambre d'hôtel et je ne rentrai pas

pendant cinq jours. Ce fut terrible. En sortant du boulot que j'avais repris

après mes quelques vacances, je me précipitais dans cet hôtel et je me mettais

à pleurer. J'étais physiquement lié à cet être et l'éloignement était une

déchirure. J'avais appris une chose. Je ne l'aimais pas. Ce que j'aimais,

c'était la part de moi que j'avais mis dedans et elle se servait de cela pour

je ne sais quoi. Mais, je parviendrais à le savoir, à un moment ou un autre.

J'avais tellement envie d'elle. La retrouver au bout des cinq jours. Je fonçais

chez moi pour me retrouver avec elle. Quand je pénétrai dans la maison,

celle-ci était vide. L'aquarium ne recelait plus rien. Je courus comme un fou

dans toute la maison pour retrouver une trace d'elle. Elle était partie. Alors

je m'effondrai en larmes, prostré de douleur tant physique que morale. J'avais

sauvé ma liberté et je m'étais sauvé moi-même de je ne sais quoi. Mais quelle

est donc cette liberté qui m'oblige à vivre sans le réconfort, le bien être

qu'elle m'apportait. Et qu'étais-je devenu, moi qui n'étais plus que l'ombre de

moi-même, une loque en pleurs, une serpillière gorgée de larmes qui traînait

toute la journée en quête d'un repère. Mes pas sur le sable, s'effaçaient au

fur et à mesure que je me rappelai de moins en moins d'elle. Les photos,

j'aurais dû en prendre pour me raccrocher à cette image, pour ne pas être de

plus en plus persuadé que ça avait été un beau rêve et rien de plus. Je déambulais

sur la plage au soleil couchant puis je m'asseyais face à la mer en attendant

qu'elle me prenne.




Cela fait

cinq ans maintenant, que ceci s'est passé. Alors que je relate ces faits, je ne

suis pas sûr qu'ils me soient vraiment arrivés et quand bien même cela se

serait-il produit, jamais je ne saurai ni pourquoi ni comment.




Je vis

maintenant avec une fille qui m'a recueilli au bord de la plage, en pleurs,

alors que la mer m'avait rejeté en un tas gluant et argenté. Et c'est marrant,

quand nous faisons l'amour, j'ai toujours peur qu'elle parte au boulot.

Pourtant je sais que je suis l'homme qu'elle a toujours aimé en secret, sans le

savoir. Je l'ai lu dans ses pensées. Mon plus cher désir est d'être son bonheur

le plus complet et de vivre avec elle au bord de cette plage du pacifique pour

l'éternité sans l'étouffer de ma présence. Mais je sens que mon silence lui

pèse. Je ne puis parler. Je ne peux m'exprimer qu'en émanations lumineuse et

odoriférantes. Je sais qu'elle m'aime mais pourquoi est-elle si malheureuse au

dedans. Sait-elle que je pense? Sait-elle que j'ai une âme ?




Grâce à

elle, j'ai retrouvé forme humaine et c'était mon plus cher désir. Maintenant,

elle va me laisser tomber, je le sens. Je me donne physiquement de plus en plus

fort et elle de concert, au fur et à mesure que nous souffrons tous les deux.

Je sais que si elle me laissait trop longtemps, je n'aurais d'autre choix pour

survivre que de gagner la mer coûte que coûte. Elle est belle et écrit des

romans, comme moi autrefois et je sens que je l'inspire comme aurait pu

m'inspirer cette autre que j'ai perdue dans les vagues du pacifique, je le sais

maintenant. Pourra- t elle connaître un jour ma vraie nature? Savoir que je

n'ai pas toujours été ainsi, que je suis au fond un être humain et que l'amour

qu'elle croît être artificiel, issu de son esprit est pourtant bien réel et que

c'est de ça que je me nourris, dont j'ai besoin pour vivre au delà du temps.

Mais ce dont j'ai pris conscience c'est que cet amour trop fort, finit par se

détruire car il soumet en esclavage les deux parties prenantes dans cette

histoire et qu'à trop vouloir de cette nourriture, je vais devoir un jour

gagner la mer car elle sera partie, la mort dans l'âme et je serai devenu une

âme chez les morts, flottant entre deux eaux en attendant d'être échoué à

nouveau. Je sais qu'elle sera emportée par les eaux et qu'un beau matin, un

jeune homme tombera amoureux d'un tas de glaires, une méduse bizarre aux fils

argentés qui aime la musique et émet de la lumière mais qui surtout a tant

besoin d'amour.

JPABT

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